ÉVÉNEMENTS ET SÉANCES SPECIALES
A PROPOS
À peine deux jours. C’est le temps qui reste à Souleymane pour préparer son entretien à l’OFPRA dont il espère qu’il obtiendra le statut de réfugié politique. Sauf que pour préparer cette épreuve, il faut être entraîné par des hommes et des femmes de bon conseil, dormir son content d’heures, ne pas se soucier de l’endroit où l’on va pouvoir se doucher et manger : bref tout le contraire de ce que subit Souleymane à Paris. Il livre des clients à la place d’un autre qui lui loue son application téléphonique. Les galères s’enchaînent évidemment avec des restaurateurs peu enclins à l’aider, des mises en danger permanentes sur la route et des clients d’une extrême froideur. Quelques pépites d’humanité se nichent sur son chemin, mais finalement si peu par rapport aux contraintes qu’il subit. L’histoire de Souleymane est celle de milliers de femmes et d’hommes, candidats à l’asile politique en France ou ailleurs dans le monde. Tout est compliqué : se soigner, se loger, se reposer, c’est-à-dire répondre à ses besoins primaires. Le chemin est d’autant plus rude qu’ils se sentent obligés d’inventer des récits politiques pour passer les fourches caudines de la demande d’asile, là où derrière leur désir d’émancipation économique se nichent d’abord des êtres vulnérables, fragiles, sans perspective autre que celle de se sauver. L’histoire de Souleymane n’est pas un mélodrame sociopolitique. C’est un témoignage ancré dans le réel de ces candidats aux papiers. Il faut saluer d’ailleurs à la fois la forte connaissance par le réalisateur, Boris Lojkine, des questions d’asile et des parcours migratoires. Le cinéaste ne triche pas, ne fait pas semblant, n’en rajoute pas dans les excès émotionnels. Son seul enjeu est de témoigner de la galère quotidienne pour ces personnes qui déposent des dossiers de reconnaissance d’asile, dans un contexte, on le sait hélas, où les radicalismes nationalistes montent partout en Europe.
Le témoignage de Souleymane voit l’émergence sur les écrans d’un très grand comédien, Abou Sangaré. Il interprète cet exilé guinéen avec une force admirable ne virant jamais au sentimentalisme ou au psychodrame. Il s’enroule dans cette humanité avec une véritable sincérité, particulièrement lors de la dernière séquence où il fait face à l’agente de l’OFPRA incarnée par la non moins remarquable Nina Meurisse. L’actrice parvient à faire prendre conscience des discours si nombreux, cousus de fils blancs, qui sont vendus aux exilés pour soit-disant obtenir une réponse positive. Bien sûr, cet exil ne relève pas des accords de Schengen au sens de la loi : il est venu en France uniquement pour nourrir sa famille et se sortir de la rue. Mais l’agent de l’OFPRA parvient à lui faire dire la vérité de son existence, au risque sans aucun doute que sa quête soit déboutée.
Voilà un film important qu’il faut regarder pour appréhender d’une part le système d’accueil en France des migrants, et d’autre part pour chercher dans les visages des exilés l’humanité que nos organisations administratives ou les discours politiques peuvent leur faire perdre. C’est aussi un vrai film de cinéma, avec un rythme, des couleurs, des mouvements au milieu de la ville de Paris. On reconnaît les stations de RER ou de métro ; Boris Lojkine immerge son spectateur dans le brut des rues, des foyers d’urgence, des douches municipales. Le film rend aussi un vibrant hommage aux livreurs de repas, si maltraités par leurs patrons ou ces gens sans complexe qui sous-louent leur application.
L’histoire de Souleymane était présenté dans la sélection 2024 d’Un Certain Regard. Il rejoint d’autres longs-métrages de la compétition (pour le coup d’un niveau assez supérieur à la compétition officielle) où le débat politique a toute sa place. C’est une œuvre dense, sincère, engagée et magnifique.
Laurent Cambon (avoiralire.com)
Avant-première / Estival Premiers Plans
lundi 26 août
2024 à 20h00
Présentée et suivie d'une rencontre avec Boris Lojkine, réalisateur
Sortie du film le 9 octobre 2024
Séance organisée en partenariat avec le Festival Premiers Plans
L'HISTOIRE DE SOULEYMANE
de Boris Lojkine
Avec Abou Sangare, Nina Meurisse, Alpha Oumar Sow
FRANCE - 2024 - 1h43 - Prix du meilleur acteur, Prix du jury - Un Certain Regard - Cannes 2024
Tandis qu’il pédale dans les rues de Paris pour livrer des repas, Souleymane répète son histoire. Dans deux jours, il doit passer son entretien de demande d’asile, le sésame pour obtenir des papiers. Mais Souleymane n’est pas prêt.
http://distrib.pyramidefilms.com/pyramide-distribution-prochainement/l-histoire-de-souleymane.html
A PROPOS
À peine deux jours. C’est le temps qui reste à Souleymane pour préparer son entretien à l’OFPRA dont il espère qu’il obtiendra le statut de réfugié politique. Sauf que pour préparer cette épreuve, il faut être entraîné par des hommes et des femmes de bon conseil, dormir son content d’heures, ne pas se soucier de l’endroit où l’on va pouvoir se doucher et manger : bref tout le contraire de ce que subit Souleymane à Paris. Il livre des clients à la place d’un autre qui lui loue son application téléphonique. Les galères s’enchaînent évidemment avec des restaurateurs peu enclins à l’aider, des mises en danger permanentes sur la route et des clients d’une extrême froideur. Quelques pépites d’humanité se nichent sur son chemin, mais finalement si peu par rapport aux contraintes qu’il subit. L’histoire de Souleymane est celle de milliers de femmes et d’hommes, candidats à l’asile politique en France ou ailleurs dans le monde. Tout est compliqué : se soigner, se loger, se reposer, c’est-à-dire répondre à ses besoins primaires. Le chemin est d’autant plus rude qu’ils se sentent obligés d’inventer des récits politiques pour passer les fourches caudines de la demande d’asile, là où derrière leur désir d’émancipation économique se nichent d’abord des êtres vulnérables, fragiles, sans perspective autre que celle de se sauver. L’histoire de Souleymane n’est pas un mélodrame sociopolitique. C’est un témoignage ancré dans le réel de ces candidats aux papiers. Il faut saluer d’ailleurs à la fois la forte connaissance par le réalisateur, Boris Lojkine, des questions d’asile et des parcours migratoires. Le cinéaste ne triche pas, ne fait pas semblant, n’en rajoute pas dans les excès émotionnels. Son seul enjeu est de témoigner de la galère quotidienne pour ces personnes qui déposent des dossiers de reconnaissance d’asile, dans un contexte, on le sait hélas, où les radicalismes nationalistes montent partout en Europe.
Le témoignage de Souleymane voit l’émergence sur les écrans d’un très grand comédien, Abou Sangaré. Il interprète cet exilé guinéen avec une force admirable ne virant jamais au sentimentalisme ou au psychodrame. Il s’enroule dans cette humanité avec une véritable sincérité, particulièrement lors de la dernière séquence où il fait face à l’agente de l’OFPRA incarnée par la non moins remarquable Nina Meurisse. L’actrice parvient à faire prendre conscience des discours si nombreux, cousus de fils blancs, qui sont vendus aux exilés pour soit-disant obtenir une réponse positive. Bien sûr, cet exil ne relève pas des accords de Schengen au sens de la loi : il est venu en France uniquement pour nourrir sa famille et se sortir de la rue. Mais l’agent de l’OFPRA parvient à lui faire dire la vérité de son existence, au risque sans aucun doute que sa quête soit déboutée.
Voilà un film important qu’il faut regarder pour appréhender d’une part le système d’accueil en France des migrants, et d’autre part pour chercher dans les visages des exilés l’humanité que nos organisations administratives ou les discours politiques peuvent leur faire perdre. C’est aussi un vrai film de cinéma, avec un rythme, des couleurs, des mouvements au milieu de la ville de Paris. On reconnaît les stations de RER ou de métro ; Boris Lojkine immerge son spectateur dans le brut des rues, des foyers d’urgence, des douches municipales. Le film rend aussi un vibrant hommage aux livreurs de repas, si maltraités par leurs patrons ou ces gens sans complexe qui sous-louent leur application.
L’histoire de Souleymane était présenté dans la sélection 2024 d’Un Certain Regard. Il rejoint d’autres longs-métrages de la compétition (pour le coup d’un niveau assez supérieur à la compétition officielle) où le débat politique a toute sa place. C’est une œuvre dense, sincère, engagée et magnifique.
Laurent Cambon (avoiralire.com)